Rezension über:

Guglielmo Ballaira (a cura di): Prisciani Caesariensis, De laude Anastasii Imperatoris (514 d.C.). Introduzione, excursus, edizione critica, traduzione, commento, bibliografia e indici (= Bibliotheca Weidmanniana; XVIII.2), Hildesheim: Georg Olms Verlag 2023, 919 S., ISBN 978-3-615-00452-6, EUR 198,00
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Rezension von:
Alain Chauvot
Strasbourg
Redaktionelle Betreuung:
Matthias Haake
Empfohlene Zitierweise:
Alain Chauvot: Rezension von: Guglielmo Ballaira (a cura di): Prisciani Caesariensis, De laude Anastasii Imperatoris (514 d.C.). Introduzione, excursus, edizione critica, traduzione, commento, bibliografia e indici, Hildesheim: Georg Olms Verlag 2023, in: sehepunkte 23 (2023), Nr. 7/8 [15.07.2023], URL: https://www.sehepunkte.de
/2023/07/37913.html


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Guglielmo Ballaira (a cura di): Prisciani Caesariensis, De laude Anastasii Imperatoris (514 d.C.)

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Ce livre de plus de 900 pages, dont certains éléments étaient déjà connus mais peu accessibles, est l'aboutissement de dizaines d'années de recherche sur le Panégyrique d'Anastase de Priscien, originaire de Césarée de Maurétanie - et non de Palestine (221-244) - un texte qui est d'un grand intérêt pour la connaissance de la haute époque byzantine [1] et qui est souvent source unique d'informations (113). Je me limite à quelques points, surtout d'ordre historique, mais me dois aussi de faire état de la qualité philologique et littéraire de l'ouvrage. Rappelant qu'il s'agit d'une œuvre de commande passée à un grammairien, Ballaira définit ce panégyrique de l'empereur Anastase (491-518) comme un "exercice scholastique" qui trouve son inspiration chez les auteurs classiques, relevant du genre de l' "épopée historico-encomiastique" (61, 113). Quant à l'usage du latin, il est lié à sa pratique notamment dans les couches supérieures, l'armée et chez les émigrés d'Occident (301-304).

Or, Priscien ne dit rien des circonstances de sa composition (114). Deux interprétations se sont opposées à propos des vers 298-299, célébrant une victoire du neveu d'Anastase Hypatius sur des Scythicae gentes. Les uns, à la suite du premier éditeur, S. Endlicher, en 1828, y ont vu l'écho d'un ultime événement attesté, un succès éphémère remporté sur des Scythicae gentes (d'origine gothe) composant l'armée de Vitalien à l'automne 513 (Chauvot, suivi par Ballaira dans un premier temps, et Coyne [2]); l'Homélie XXXIV de Sévère d'Antioche à l'automne 513 aurait fait allusion à cette victoire. Pour d'autres, il s'agirait de succès sur des Bulgares d'Outre-Danube qu'aurait remportés Hypatius entre 493 et 502 (datation du panégyrique en 503 pour Cameron, début 502 pour Haarer [3]). Or, en 2005, Ballaira, revenant sur sa position antérieure, a proposé une nouvelle datation, printemps-été 514, la resituant ici dans son contexte historique (114-190): dans l'Homélie XXXIV apparaît, ce qui n'avait pas été vu par Chauvot, la notion de "victoire non sanglante", qu'il faut rapporter à un événement qui ne peut être que la levée du siège de Constantinople par Vitalien, à l'automne 513, obtenue sans combat par Anastase, et non le succès d'Hypatius. La victoire "sanglante" de celui-ci, évoquée dans le poème, doit être décalée au printemps ou à l'été 514. C'est à ce moment-là qu'elle a dû être célébrée dans l'Hippodrome de Constantinople lors d'une cérémonie pendant laquelle Priscien a pu prononcer le panégyrique. Anastase y a été acclamé avec les titres triomphaux figurant dans la subscriptio du poème, ou apparaît Gothicus, après Isauricus et Parthicus (271-281). Cette solution est convaincante et Ballaira reprend à frais nouveaux l'étude de la révolte de Vitalien, d'après lui entre 513 et 515 (191-217).

Cet arrière-plan donne la clef d'interprétation de l'œuvre, reflet d'angoisses en période de crise et exaltation d'un Prince nommé et protégé par Dieu: le panégyrique apparaît comme "une continuelle prière de remerciement et d'imploration" (185). Le concept de protection divine est le fil conducteur et explique en partie la composition: le passage consacré à la guerre contre les Isauriens en 491-498 est un message visant les adversaires contemporains ou potentiels d'un empereur bénéficiant de la protection divine. Et l'exaltation des liens entre Anastase et sa famille (v. 294-300) aurait valeur d'avertissement envoyé aux dignitaires, aristocrates et chefs militaires qui pourraient être tentés de rejoindre Vitalien (188).

Cette relation entre Dieu et l'empereur apparaît dès l'avènement (245-270). Ballaira estime (592-600) que les v. 162-163, faisant allusion au couronnement et mentionnant la remise du diadème par le rector Olympi, sont en cohérence avec le récit de Pierre le Patrice. Contre la thèse de Dagron [4], pour lequel le fait, pour le patriarche, "de couronner (Anastase) dans le salon de la loge impériale de l'Hippodrome n'est qu'une bénédiction, en privé, des insignes d'une royauté déjà conférée", Ballaira estime qu'il s'agit d'une investiture religieuse, une innovation montrant le rôle croissant du patriarche (270). [5] Sans doute aurait-il été nécessaire de prendre davantage en compte le rôle d'Ariane, veuve de Zénon mais surtout fille de Léon Ier, qui a transmis à Anastase le patrium regnum (775-776), alors que Procope de Gaza donnait dans son panégyrique en 502 (confirmation de cette date par Ballaira: 296-300) une autre lecture: si le pouvoir est bien pour lui d'origine divine, Procope, plus proche de l'avènement, insistait sur le rôle des électeurs et n'évoquait Ariane que pour mentionner son "assentiment", en passant sous silence sa qualité de fille de Léon Ier. Priscien, tout en étant également attentif, dans l'ensemble du panégyrique, au rôle des dignitaires, de l'armée, du sénat et du peuple (188), établit, douze ans après Procope, dans une perspective dynastique, le cadre de la transmission du pouvoir pour l'avenir - Anastase a alors 84 ans.

Plutôt que d'énumérer les réformes d'Anastase, pour lesquelles l'état de la question et les hypothèses sont clairement exposés, je choisis d'évoquer deux problèmes importants à propos desquels Ballaira se démarque de la plupart des spécialistes. Il estime que la création des vindices (allusion aux v. 193-194) a été le fait de Marinus lors de sa première préfecture du prétoire, qu'il date de 506-511, en accord avec Chauvot (282-295). Le texte de Priscien soutiendrait l'hypothèse d'une création de ces fonctionnaires fiscaux dans toutes les cités, surveillant les curiales qui continueraient leurs fonctions de percepteurs (293-295, 642-645) (mais on a pu y voir une réforme, peut-être systématique à l'origine, mais en définitive de portée géographique limitée et "paralysant" les curies touchées). La question des relations entre les séditions et les spectacles (v. 218-227) est abordée dans le commentaire linéaire (672-691). Le panégyriste évoque des rixes sanglantes et nocturnes, dans lesquelles des meurtriers pris de boisson prenaient plaisir à frapper leurs concitoyens tout en s'applaudissant et salue la disparition de la seditio dans les cités (v. 218). Puis il évoque la suppression des venationes sanglantes en 499 sans la relier explicitement à la fin des séditions. Pour Chauvot et Coyne, ce rapprochement serait significatif. Ballaira estime que presque tous les commentateurs ont mal compris le texte, en croyant que Priscien faisait allusion aux tumultes urbains en général: il ne viserait là, selon lui, que les désordres nés à l'occasion des spectacles licencieux de pantomimes (travestis) lors de la fête des Brytae, qui mettaient en émoi les spectateurs au point de provoquer ces rixes, d'où leur interdiction en 502 (Procope de Gaza, 16). Il est judicieux de rapprocher les descriptions des désordres par les deux panégyristes, où l'on retrouve des points communs. Toutefois, Priscien, à la différence de Procope, n'évoque pas explicitement l'interdiction des pantomimes. On peut, me semble-t-il, conserver l'hypothèse d'un lien global entre certains spectacles (venationes et pantomimes) et séditions. Mais Ballaira met l'accent à bon droit sur le sens de seditio dans ce passage : celle-ci ne concerne pas ici l'ensemble des désordres mais seuls ceux qui mettaient aux prises entre eux des concitoyens.

Certes, la complexité voire l'enchevêtrement des problèmes peuvent entraîner des redites et pourraient parfois déconcerter un lecteur non spécialiste; mais, par la maîtrise des sources, la connaissance d'une immense bibliographie, une méthode minutieuse et rigoureuse, l'ampleur des thèmes traités et la clarté de multiples démonstrations, cette somme est un ouvrage de référence tant sur Priscien que sur Anastase, et, de façon générale, sur la haute époque byzantine.

Remarques :

[1] Ajouter à la bibliographie: Sviatoslav Dmitriev: "Early Byzantine Ideologies in two Panegyrics for Anastasius", dans: Byzantion, 90 (2020), 19-40.

[2] Alain Chauvot: Panégyriques de l'empereur Anastase Ier. Textes traduits et commentés, Bonn 1986; Guglielmo Ballaira: Prisciano e suoi amici, Turin 1989; Patricia Coyne: Priscian of Caesarea's de laude Anastasii imperatoris, Lewiston, Queenston, Lampeter 1991. Ajouter à la bibliographie: Gian Luca Ventrella: "Sur la datation du De laude Anastasii imperatoris de Priscien de Césarée", dans: Phoenix, 71, 1-2 (2017), 157-173, qui propose, en se fondant sur Jean d'Antioche, la date de 511, en faisant commencer la révolte de Vitalien en 510 ou 511.

[3] Alain Cameron: "The Date of Priscian's De laude Anastasii", dans: Greek, Roman and Byzantine Studies, 15 (1974), 313-316; Fiona Haarer: Anastasius I. Politics and Empire in the Late Roman World, Cambridge 2006, 272-277.

[4] Gilbert Dagron: Empereur et prêtre. Étude sur le "césaropapisme" byzantin, Paris 1996, 103.

[5] Ajouter à la bibliographie, dans le même sens: Audrey Becker: "Dieu et le couronnement des empereurs protobyzantins", dans: Les dieux et le pouvoir. Aux origines de la théocratie, éds. Marie-Françoise Baslez / Christian-Georges Schwentzel, Rennes 2016, 143-156.

Alain Chauvot