Christoph Begass (Hg.): Johannes Lydos' De magistratibus. Autor - Werk - Kontext (= Roma Aeterna; Bd. 17), Stuttgart: Franz Steiner Verlag 2025, 244 S., 2 s/w-Abb., ISBN 978-3-515-13775-1, EUR 56,00
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On ne peut que se réjouir de la parution, au sein d'une collection réputée, d'un recueil faisant le point sur l'œuvre de Jean le Lydien. Logiquement, il revenait à l'initiateur de l'entreprise, l'historien patenté qu'est Christoph Begass, de faire ressortir les tendances actuelles de la recherche. Le point de départ a été un colloque organisé à l'Université de Mannheim, les 18 et 19 janvier 2020.
Les études sur le De magistratibus, le seul traité du Lydien à être relativement bien conservé, s'y taillent évidemment la part du lion, comme indiqué dans l'article liminaire de Begass: «De magistratibus, Altertumswissenschaftliche und wissenschaftsgeschichtliche Perspektiven» Le corps de l'ouvrage est constitué de quatre parties: (1) le contexte; (2) Jean l'historiographe; (3) le De magistratibus et les autres traités; (4) Jean et le gouvernement au 6
Comme le signale A. Berger («Johannes Lydos und Konstantinopel»), Jean a passé le plus clair de sa vie à Constantinople, même si les habitants eux-mêmes n'apparaissent pour ainsi dire pas dans l'œuvre, hormis à propos de la sédition Nika en 532, où est décrite la destruction dans les flammes des monuments importants. L'occasion était belle d'évoquer le souvenir des grandes familles originaires de Rome, de leurs vastes palais et de leurs contributions intellectuelles, comme le Dioscoride de Vienne, réalisé vers 512 à l'initiative de la princesse Julia Anicia, fille de l'empereur Olybrius († 472 ). La figure de deux des trois empereurs, Anastase et Justinien, que Jean 'a bien connus demeure quelque peu ambiguë, ainsi que le montre M. Meier («Kaiser und Kaisertum in Johannes Lydos' de magistratibus»).
Certes, les traits de panégyrique ne manquent pas à leur propos dans le traité, mais l'écrivain ne se prive pas de relever les défauts ou les outrances de leurs règnes, en sorte que l'empereur y est aussi donné dans un certain sens comme un héritier du τύραννος. Les conceptions de l'histoire sont au centre de deux autres contributions. Libertas signifie aussi pratiquement «République»: on devait donc s'interroger sur la philosophie politique de Jean Lydien, à la suite de S. Dmitriev («Roman History in John Lydus's Political Philosophy»), qui rappelle à juste titre l'opposition perceptible dans l'œuvre entre Romulus et Numa. En somme, Jean a rationalisé l'histoire romaine en se fondant sur les principes de la philosophie grecque qu'il a combinés avec la conception romaine de la royauté. Jean était-il un 'adepte d'une histoire mâtinée de philosophie? Telle est la question que pose O. Schelske («Johannes Lydos als philosophierender Historiograph? Methode und literarisches Self-Fashioning»), Jean avait été lié avec le néoplatonisme contemporain, notamment avec Agapios. Avait-il véritablement une conception personnelle de l'histoire. Rien n'est moins sûr. Ce qui importait à ses yeux était de vivre au sein d'une communauté politique divisée en deux sphères et d'y renforcer l'unité culturelle grâce à notamment un bilinguisme actif.
Les données disponibles ne permettent guère de se prononcer sur les conceptions personnelles de Jean en matière de religion. Abordant en partie le De ostentis et surtout sur le De magistratibus, l'article de G. Rota («Does Religion Really Matter? Some Observations on John Lydus' De ostensis and De magistratibus») roule sur l'importance de la religion. Il revient sur deux traits importants: l'élection du monarque et les rôles de τύχη, Dieu et le καιρός. Significatif est aussi l'établissement de la République à Rome: après consultation d'un oracle (peut-on en imaginer un autre que celui de Delphes?), Brutus se rend à Athènes où apparemment il trouve un modèle pour Rome. C'était là pour Jean une autre manière de renforcer le lien entre les deux moitiés de l'Empire.
La contribution s'achève par une étude sur le chapitre 53 du De ostentis. Après l'édition fondamentale de Wünsch (1898), il restait beaucoup à découvrir sur le De mensibus, comme l'a montré la dizaine de riches articles que lui a consacrés depuis 2015 un savant suisse, E. Zingg. L'heure a-t-elle sonné pour une nouvelle édition critique? C'est ce que suggère le titre «Das Stemma von Johannes Lydos, Peri menôn» (129-173). En fait, ce stemma est le premier à avoir été établi depuis Wünsch. Zingg définit clairement les limites du traité en quatre livres et distingue les multiples éléments dont se compose la tradition. Cette dernière repose sur des extraits tirés directement de l'œuvre, une tradition mélangée où entrent divers auteurs byzantins, plusieurs lexiques, des traités constitués de miscellanées ou d'ensembles au contenu bien inventorié. Il se prononce sur la proximité de chaque document avec l'original perdu. Incontestablement, on a le plaisir de lire ici un travail de haute tenue.
La dernière section du recueil a trait au gouvernement tel qu'il est présenté dans l'œuvre. S. Schmidt-Hofner («Elitenhabitus und Recht bei Johannes Lydos und seinen Zeitgenossen») s'est intéressé à la connaissance du droit comme marque distinctive de l'élite sociale à laquelle appartenait Jean le Lydien. Que le De magistratibus laisse apparaître de l'attachement à la littérature juridique de l'époque ne saurait surprendre: les magistrats et par conséquent les praticiens du droit y sont nommés avantageusement. Sur le plan politique, le régime politique prôné est celui auquel aspirait la même classe sociale, l'ἔννομος βασιλεία. Comme le rappelle Rafał Kosiński («Church Histories as Sources for the History of Administration»), le De magistratibus offre un irremplaçable lot d'informations sur l'histoire des institutions ; il en va de même des diverses histoires ecclésiastiques où apparaissent maints récits d'envois en relégation ou en déportation, mais aussi des affaires de pédérastie et d'hérésie à plaider devant la cour du magistrat ad hoc. Les évêques exerçaient d'autre part une autorité réelle sur les représentants du pouvoir et nombre d'écrivains ecclésiastiques étaient aussi fort bien informés en matière de droit.
Ajoutons que chacune des contributions du recueil est pourvue de la bibliographie utile et que l'ouvrage ne laisse rien dans l'ombre. Le lecteur dispose d'une abondante batterie de registres, noms propres, lieux, choses, sources antiques et byzantines (auteurs, inscriptions, pièces de monnaie et papyri), mots grecs et latins. Pratiquement, la typographie est impeccable. Bref, voici un excellent livre qui donnera un élan nouveau à la recherche sur Jean le Lydien et l'histoire du VIe siècle.
Jacques Schamp