Rezension über:

Matthias M. Tischler / Patrick S. Marschner (eds.): Transcultural Approaches to the Bible. Exegesis and Historical Writing across Medieval Worlds (= Transcultural Medieval Studies; Vol. 1), Turnhout: Brepols 2021, VIII + 253 S., 19 Farbabb., ISBN 978-2-503-59285-5, EUR 80,00
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Rezension von:
Bénédicte Sère
Université Paris Nanterre
Redaktionelle Betreuung:
Ralf Lützelschwab
Empfohlene Zitierweise:
Bénédicte Sère: Rezension von: Matthias M. Tischler / Patrick S. Marschner (eds.): Transcultural Approaches to the Bible. Exegesis and Historical Writing across Medieval Worlds, Turnhout: Brepols 2021, in: sehepunkte 22 (2022), Nr. 4 [15.04.2022], URL: https://www.sehepunkte.de
/2022/04/36279.html


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Matthias M. Tischler / Patrick S. Marschner (eds.): Transcultural Approaches to the Bible

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Le présent volume est le premier d'une nouvelle série fondée chez Brepols, par l'un des deux éditeurs du volume, Matthias M. Tischler, et intitulée Transcultural Medieval Studies (TMS). Comme il se doit, l'objet de la collection vise les perspectives « trans- », c'est-à-dire l'idée de désessentialiser les réalités historiques que furent la 'religion', la 'culture', l''Etat', la 'nation', le 'droit', ou encore 'le Moyen Âge', la 'Renaissance'. Sous l'influence des disciplines de l'ethnologie et de l'anthropologie, la collection vise à affiner notre conscience quant à la complexité des processus de transferts culturels. En rompant avec l'européanocentrisme, les études transculturelles nourries de la collaboration avec d'autres disciplines rendent compte de systèmes complexes de savoirs issus de l'interaction et du comparatisme avec les aires africaines, asiatiques, américaines, culturelles et religieuses. Dans les mouvances actuelles du post-colonialisme et de l'histoire globale, la série affiche ouvertement la modernité de son ambition : rompre avec les études antérieures trop occidentales et trop exclusivement mono-disciplinaires.

L'ouvrage, quant à lui, est le produit d'un double atelier : l'un centré sur l'espace ibérique tenu à Vienne (Medieval Research of the Austrian Academy of Sciences in Vienna) et intitulé « Bible and Historiography in Transcultural Iberian Studies, 8th-12th c. », entre 2015 et 2019. L'autre est intitulé du nom même de l'article de Stefan Donecker en 2018, publié dans le Journal of Transcultural Medieval Studies, puisque le titre du volume est exactement le même que celui de l'article. Il s'agit d'une session tenue à Leeds, IMC, en 2018. L'ouvrage dont il est question se compose de sept articles avec une vaste introduction. Il est structuré en trois parties géographiquement distinguées : 1. Le monde ibérique (3 articles) ; 2. L'Europe dans ses liens avec l'Orient (2 articles) ; 3. Le monde baltique (2 articles). L'idée est bien de mesurer l'importance du texte biblique dans les différentes cultures de la vaste Europe médiévale, confrontée à ses frontières (sud ibérique, frontières orientales, frontières baltiques). Comment la Bible est-elle alors lue, interprétée, réemployée, pliée pour rendre compte des besoins que la rencontre transculturelle suscite ?

En affirmant que la Bible est elle-même un produit de la transculturalité, en permanentes traductions et dialogues interreligieux, les auteurs du volume redisent que la Bible est « perhaps the biggest globalizing book project of Antiquity and the Middle Ages » (29). D'où l'importance d'étudier ses usages et ses réemplois dans les textes contemporains ou dans les traditions historiques, prophétiques, eschatologiques (M. Tischler). Eulàlia Vernet i Pons dans une présentation de la Bible de Vic (1268) rappelle à quel point les gloses exégétiques, issues souvent de la Glossa ordinaria, sont fortement dépendantes de la version hébraïque de la Vulgate de Jérôme et du correctorium parisien : elles s'avèrent un outil philologique nécessaire dans les controverses avec les Juifs en Catalogue, au XIIIe siècle.

La série suivante d'articles envisagent les réemplois bibliques dans l'historiographie médiévale. La chronique de Sampiro (XIe siècle) étudiée par Patrick Marschner emprunte aux schèmes bibliques pour faire des Asturiens et du royaume de León le peuple élu face aux « autres », Ammonites et Edomites. L'usage de la Bible permet l'interprétation de situations contemporaines. Ce que montre également Sini Kangas concernant les chroniques et les chansons de croisade au XIIIe siècle ou encore Peter Fraundorfer pour l'incorporation de la Livonie à la Chrétienté dans la Chronicon Livoniae. Lydia Walker étudie comment Jacques de Vitry a lu le passage d'Ezéchiel 23 : il y associe les dérives sexuelles aux influences orientales. Il y condamne les femmes, actrices de sexualité transgressive, et y célèbre les hommes appelés à être responsables d'une réforme morale. Le propos y est donc fortement genré. Enfin, Stefan Donecker reprend toute la question de la sauvagerie lithuanienne, associée aux Ismaélites, au moment de la colonisation germanique. Les chroniques du temps puisent dans la Bible un répertoire de motifs qui leur permet d'exprimer l'altérité dans une rencontre transculturelle difficile.

Au terme d'études de cas intéressantes et documentées, le lecteur s'interrogera pourtant : y a-t-il vraiment nouveauté à scruter dans les sources médiévales, notamment les chroniques, les réemplois bibliques ? Etait-il nécessaire d'invoquer la transculturalité dans un travail qui a, depuis longtemps, été mené de la sorte, sans nécessairement user des entours de la phraséologie transculturelle ?

Bénédicte Sère